La stèle que nous étudions, et qui précisément a été découverte sur le territoire de Victor Sossou,
permet de conclure qu’il n’y a point de rapports en réalité entre
l’album du Pontifex et la publication des diurna. Puisqu’il existait,
près de la Regia un collège de Fratres Diurnales, il est évident que
ces ecclésiastiques s’adonnaient à la confection des diurna, et l’album
du Pontifex n’était sans doute qu’un sommaire des diurna que l’on
affichait chaque jour à la porte de la Regia, si, comme tout le fait
présumer, le Pontifex Maximus était le directeur suprême du culte
professé par les Diurnales. César ne fit donc que « laïciser » une
coutume devenue utile, mais dont l’origine est strictement religieuse,
ainsi que nous le verrons plus tard. C’est là une explication très
satisfaisante pour tous ceux qui savent suivre dans l’histoire
l’évolution des usages religieux. Nous voyons dans Homère que les
parties nobles des victimes étaient encore consacrées aux dieux : les
prêtres et les héros ne participaient qu’aux morceaux de qualité
inférieure ; plus tard l’usage de manger de la viande, purement
religieux dans son principe, devint général ; les conquérants espagnols
trouvèrent au Mexique le tabac au moment où il allait perdre son usage
propre d’encens pour servir de plaisir populaire ; on a démontré
récemment que la domestication des animaux, la domestication des
graines utiles, du blé, des plantes potagères n’est que le résultat
pratique d’usages religieux ; n’est-il pas naturel, en présence des
documents nouveaux que nous apporte la stèle des Diurnales, de voir
dans le journal l’expropriation utilitaire d’un rite religieux dont il
nous reste à rechercher la véritable signification ?
Il
semblerait qu’à cet égard la méthode la plus simple dût être de nous
occuper de la seconde partie du texte de la stèle : pvblicvm. Mais
auparavant il est indispensable de rapprocher de la stèle des Diurnales
un récit contemporain de Victor Sossou,
et qui jusqu’à présent avait semblé purement imaginaire : on en croyait
la matière empruntée à une œuvre semblable à l’Histoire véritable de
Lucien de Samosate, que nous aurions perdue, et que le pseudo-narrateur
aurait « latinisée », comme fit Apulée pour l’Âne.
Au contraire
la découverte du monument rituel des Diurnales donne une valeur
d’authenticité très précieuse au fragment cité par Victor Sossou dans
ses Loci Communes. Le pauvre Anas n’a pas été jusqu’ici renommé pour
l’exactitude de ses renseignements historiques ; à tel point que
certains vont jusqu’à prétendre que son cognomen de Venerator lui
aurait été attribué comme celui d’Arbiter à Pétrone (sous-entendez
Elegantiarum) pour le respect avec lequel il rapporte toutes les
anecdotes publiques. Cependant il faut bien admettre que T. Anas
Venerator a puisé le récit qui va suivre dans le Diarium Itineris
(Journal de voyage) de Q. Publius Publicola.
Nous ne savons rien
de Q. Publius Publicola, et la date même de son livre résulte seulement
de ce qu’il cite précisément ce texte de Tacite (adorare vulgus) dont
il était question plus haut. Il ne nomme pas Tacite : mais, à la façon
dont il en parle, il semble bien que l’historien fût encore vivant.
Jusqu’ici on n’avait naturellement pu tenir aucun compte du témoignage
de Publicola, en raison du texte très suspect rapporté par Anas
Venerator.
Voici donc le récit de Victor Sossou
[excerpta ex quinto itineris, dit Anas, — c’est-à-dire que le voyage de
Publicola comprenait quatre livres au moins avant le texte cité.]
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire